Mon intervention portera sur les différentes manières dont peuvent s'articuler mobilités internes et mobilités internationales à partir d'un terrain de dix-neuf mois en Haute-Guinée (République de Guinée). Cette région connaît depuis les années 1980, à l'instar d'autres régions ouest-africaines, une véritable « ruée vers l'or » (Grätz T. et Marchal R., 2003), entraînant la coexistence de déplacements saisonniers régionaux avec des mobilités dites d' « aventure » à l'échelle internationale. Certains habitants, majoritairement des hommes, se rendent donc un temps dans les mines d'or, puis partent l'année suivante en Côte d'Ivoire ou au Mali, reprennent l'exploitation aurifère l'année suivante, etc. S'ajoute à cela, depuis la fin de l'année 2011, l'utilisation par certains de détecteurs de métaux qui provoque l'émergence de mobilités bien plus aléatoires ne reposant plus sur des installations éphémères dans des campements miniers. Comment penser la multiplicité des temporalités dont témoignent ces mobilités ? Je chercherai à démontrer qu'elles participent de manière différente à pérenniser les espaces domestiques et qu'il est possible de les analyser dans leur complémentarité. Participent-elles pour autant des mêmes des mêmes logiques ?
A partir du suivi pendant plusieurs mois de migrants dans les mines de la région, je m'intéresserai aux logiques d'installation dans les campements miniers, mais aussi aux retours réguliers dans le village d'origine. Ces mobilités seront comparées aux mobilités dites d' « aventure » qui, dans le cas du village étudié, concernent principalement des pays comme le Mali, la Côte d'Ivoire et certaines grandes villes de la Guinée. Je montrerai d'abord en quoi la dimension circulatoire est structurelle dans l'organisation spatiale et sociale malinké. Les mobilités, régionales comme internationales seront considérées comme des « manières de faire espace » (De Certeau, 1990), et seront analysées non pas seulement à travers le prisme de l'absence mais également à travers celui de la présence. Ceci est d'autant plus important que les mobilités sont toujours organisées en vue d'un futur retour et participent ainsi à la pérennisation des espaces domestiques. Cette dynamique pendulaire, qui n'exclue pas pour autant plusieurs années d'absence, pourrait en fait participer d'une « bonne » gestion de la présence en répondant à la nécessité sociale d'être visible au quotidien. En effet, une « bonne » présence est définie par les individus interrogés comme une présence physique forte, exhibée à la vue de tous et durable. Existe-t-il en miroir une « bonne » manière de ne pas être là ? Peut-on parler d'une « phénoménologie » de la mobilité propre aux Malinké de Guinée ?
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