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Souveraineté et politique foncière au Sénégal: Coupe longitudinale d'un processus de réforme en cours
Ibrahima Ka  1, *@  
1 : Initiative Prospective Agricole et Rurale  (IPAR)  -  Site web
Immeuble Bilguiss, VDN Ouest Foire BP 16788, Dakar Fann, Senegal Tel : (+221) 338690079 -  Sénégal
* : Auteur correspondant

Atelier : "Lire l'Etat par le foncier : les transactions foncières comme objet de recherche"

Le cadre juridique et institutionnel de la gouvernance du foncier rural au Sénégal est consacré par la loi du 17 juin 1964 relative au Domaine National et ses nombreux textes d'application. Cette loi souffre aujourd'hui de son anachronisme par rapport au contexte socio-économique actuel auquel elle n'arrive pas à s'ajuster et cela malgré le fort consensus autour de la nécessité de refonder le système global de gouvernance foncière. Depuis trois décennies, toutes les dynamiques de réforme se sont soldées par des échecs. Toutefois, depuis la seconde alternance intervenue en mars 2012, une dynamique progressiste de réforme semble être enclenchée avec la mise en place de la Commission Nationale de Réforme Foncière (CNRF). Dans une mobilisation placée sous le sceau d'une démarche inclusive et participative, la commission est entrée dans une phase décisive et elle cristallise tous les espoirs. Elle a produit une note d'orientation stratégique qui identifie les axes et hypothèses de la future réforme.

Cette communication va s'attacher à faire la coupe longitudinale du processus actuel de réforme foncière au Sénégal. Elle reprendra quelques éléments que nous sommes entrain de traiter dans le chapitre troisième de notre thèse. En effet, nous convenons que l'effort de réforme du foncier rural au Sénégal est sous influences multiples, d'un coté, de transformations progressives au sein de la société sénégalaise (Plateau, 1996) et de l'autre, de multiples décisions prises aux différentes échelles d'intervention supra étatiques : au niveau sous-régionale ou communautaire (UEMOA, CEDEAO, CILSS etc.), au niveau continental (LPI avec l'UA, l'OHADA etc.) et au niveau mondial (les institutions financières d'aide au développement comme la Banque Mondiale, la FAO avec les directives volontaires pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux forêts et aux pêches, les politiques bilatérales menées par les agences intergouvernementales comme l'AFD, la GTZ etc.).

La communication abordera les aspects suivants :

- Le déclic accélérateur du processus de réforme du foncier rural au Sénégal est directement lié à l'agenda international. En effet, depuis 1996, beaucoup d'efforts de réforme sont restés vains. Actuellement, la dynamique enclenchée est prometteuse parce que l'Etat est « obligé », d'une part de prévenir la prédation foncière (COMBY J., 2007) et d'autre part, de redynamiser le processus de réforme pour capter les niches d'investissements porteurs de développement. Le gouvernement fait de la réforme foncière une condition de réussite du Plan Sénégal Emergeant (PSE), le plan de développement économique et social de référence du pays. 

- La note d'orientation stratégique qui identifie les principaux axes sur lesquels la réforme foncière va porter est fortement influencée par les politiques foncières portées par les institutions d'aide au développement (MERLET M., 2012) Cette note reprend intégralement le schéma foncier prévu dans le Projet de Développement Inclusif et Durable de l'Agrobusiness au Sénégal (PDIDAS) financé par la Banque Mondiale. La réforme risque d'être calquée sur un modèle commercial au détriment des firmaments sociaux. Cela risque d'impacter la souveraineté internationale. Encore faut-il souligner que ce projet n'en est qu'à ses débuts et que ce schéma n'est pas encore éprouvé à l'épreuve du terrain.

Les différentes propositions qui sont entrain d'être reversées dans les débats par les différentes parties prenantes à la réforme convergent vers la formalisation des droits et l'option de l'immatriculation des terres au nom de l'Etat semble s'affirmer avec beaucoup de convictions. Le Sénégal a alors engagé une réforme développementaliste adossée sur l'introduction des terres dans le commerce juridique. (LE ROY, 1987 : les dangers de la généralisation du droit de propriété privée en Afrique ; Oakland Institut, 2014). Nous montrerons qu'il s'agit là d'une option en marge de la tendance globale dans les pays africains où beaucoup d'entre eux (huit pays francophones de l'Afrique de l'Ouest et le Madagascar) ont des politiques foncières renouvelées qui tournent autour de la présomption de propriété, laquelle appelle à la constatation de la propriété de la terre au profit des propriétaires individuel ou collectif. 



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