la proposition s'insrit dans l'axe 3) Quelles modalités de reconstruction de l'Etat ? et 1) l'Etat au travers de ses matérialités comme de sa spatialisation, action et service public, et aménagement du territoire.
A partir du cas du Congo, l'objectif serait de mener une réflexion comparée entre plusieurs Etats dotés d'une autonomie de ressources et bénéficiant d'IDE, sur la ferme reprise en main par les équipes présidentielles de leurs stratégies admnistratives, de contrôle et d'aménagement du territoire, notamment en contexte post-conflit, en jouant sur les registres de partenariats externes et internes à géométrie variable.
L'approche est fondée sur de multiples études de terrain menées au Congo entre 2006 et 2015 par une équipe d'Aix-Marseille Université/LPED: à Brazzaville et Pointe-Noire, à Oyo (ville présidentielle) et Mokeko-Pokola (zones administrées par une compagnie agro-forestière internationale), dans les département du Niari, Lekoumou, Bouenza et dans une zone particulièrement délaissée du Pool, que l'on peut qualifie, jusqu'en 2013, de "zone grise".
On propose d'abord d'analyser les ambivalences de l'évolution du Congo entre "post-conflit", "reconstruction", sa caractérisation comme "Etat fragile", soutenu à ce titre par les institutions internationales... En parallèle, on discutera son affirmation, en interne, comme à l'international comme Etat stabilisé, unitaire, attractif pour les investissements internationaux et qui affirme un objectif d'émergence économique pour 2025.
Le pays est marqué par une extrême continuité du personnel politique, notamment du chef de l'état et de son entourage depuis 1979. L'alternance démocratique civile fut écourtée par une dizaine d'années de guerres entre armée et milices politiques. La notion d'Etat est ici inséparable du président D S. Nguesso, vainqueur de la guerre de 1997, réélu en 2002 et 2009, et en passe de l'être à nouveau en. 2016, dans un contexte controversé de changement constitutionnel.
Depuis 1997 et après une phase de répression avec d'importants déplacements de populations, la stabilisation politique et le contrôle territorial ont été des priorités. Les années de forte croissance des revenus pétroliers ont ensuite permis une politique de dépenses publiques et une ébauche de reconstruction. Elle est spatialement très sélective : l'action de l'Etat aménageur est centrée sur quelques axes et pôles économiques. Une intense et efficace communication médiatique, affirme la légitimité de l'Etat à travers la visibilité de ces "Grands Travaux" présidentiels (aéroports dans les 2 métropoles, route nationale goudronnée, barrage). Ceux-ci s'inscrivent dans une stratégie centralisée d'aménagement du territoire et de mise en scène de l'autorité publique. Une politique présidentielle qualifiée de "municipalisation accélérée" (2014-2015), rythmée par les cérémonies annuelles de la fête nationale, a permis de reconstruire ou rénover les administrations publiques et autres symboles de l'Etat dans tous les départements. La libéralisation économique est également encadrée par l'Etat, avec une politique d'appel aux IDE, et de zones économiques spéciales... Les investissements sont fortement associés à des opérateurs de l'entourage présidentiel.
Mais un état des lieux réalisé sur place entre 2011 et 2015 souligne la pauvreté majoritaire, une forte hétérogénéité territoriale longtemps après les guerres et la situation en suspens de jeunes ex-miliciens. La logique "post-conflit" proprement dite, centrée sur les espaces et populations en difficulté est presque uniquement portée par les institutions internationales et leurs projets dans les Ministères, qui jouent depuis près de 15 ans un rôle supplétif dans le traitement social de la reconstruction. A partir de l'étude de territoires très affectés, définissant encore des "zones grises" au cœur du sud-Congo, nous avons analysé comment s'articulent les logiques de normalisation politique, de renforcement de l'Etat, de contrôle et d'intégration territoriale, de reconstruction post-conflit , de résilience pour les populations. Le rôle des acteurs du processus (l'Etat-vainqueur et son appareil, les bailleurs internationaux et leurs ONG prestataires, les habitants, civils, les ex-combattants qui parfois se rebiffent encore...) et leur articulation dans les territoires méritera d'être éclairé à la lumière du processus électoral en cours dans le pays.