Les études migratoires concernant l'Afrique se sont concentrées sur les flux au départ des territoires africains. Elles ont longtemps été dominées par la figure emblématique du travailleur immigré, que l'imaginaire européen se représente à travers la figure du travailleur subsaharien ou maghrébin, dont la migration résultait d'un appel de main-d'œuvre contrôlée par les États ou du fonctionnement même des communautés immigrées. Dès la fin des années 80, de plus en plus de recherches revisitent cette lecture bâtie sur une approche push-pull, en s'ouvrant par exemple aux migrations féminines et en discutant les liens transnationaux et diasporiques qui se créent en migration. Plus récemment, des travaux ont renouvelé le débat, en appréhendant le migrant à travers le paradigme de la mobilité, de l'entreprenariat et de la circulation. Le foisonnement d'études sur les migrations, en faisant émerger de nouvelles thématiques et en s'intéressant à de nouvelles figures, a permis de rendre compte des profondes transformations intervenues ces trente dernières années.
Toutefois, ces changements d'approche n'ont que peu remis en question les espaces et les itinéraires des flux, encore majoritairement pensés comme des mouvements Sud-Nord et plus récemment Sud-Sud, ou les figures de ces flux, encore majoritairement appréhendés au travers d'une approche misérabiliste de la migration.
Deux mouvements semblent avoir été laissés de côté. D'une part, les trajectoires des Européens vers l'Afrique, que l'on ne saurait pas réduire uniquement à la colonisation, aux pratiques touristiques ou à celles du retour, ne retiennent que récemment l'attention dans le champ académique français. D'autre part, les trajectoires des classes moyennes africaines vers l'Europe sont encore globalement peu étudiées.
Attentif à la diversité des formes, des figures et des expériences de ces mobilités entre Afrique et Europe, cet atelier souhaite ne pas les cloisonner dans des typologies préétablies (immigration, tourisme, expatriation, retour, lifestyle migration) mais les appréhender dans leur globalité. Prêter attention à un plus large spectre revient, en effet, à se demander si ces mobilités présentent des caractéristiques communes et, si oui, lesquelles ; si des figures hybrides ou minoritaires se meuvent en contre-champ de celles catégorisées; si des zones d'ombre existent aux marges des expériences les plus répandues. Cet atelier s'inscrit dans une dynamique d'ouverture du champ des migrations internationales. Il voudrait ainsi contribuer à interroger les processus de transnationalisation, d'hybridation et de circulations qui travaillent les territoires africains tout comme les transformations des relations entre Europe et Afrique au prisme des questions migratoires.
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