Dans les débats actuels en anthropologie sociale comme dans les études muséologiques, on voit émerger des analyses critiques sur l'histoire et le rôle actuel des musées ethnographiques. Il existe des doutes au sujet de la capacité des musées ethnographiques à surmonter leur héritage colonial datant de la période de leur établissement et des décennies suivantes. Ainsi, la majorité de leurs collections ne représentent pas seulement les cultures matérielles des régions étrangères mais elles sont aussi l'expression des idéologies locales ainsi que des pratiques et inégalités coloniales. L'héritage du colonialisme, le racisme et l'émergence du capitalisme global sont profondément enracinés dans les structures et les fonctions des collections. Par ailleurs, la prétention de représenter ‘'les Autres'', les peuples des périphéries dont les cultures sont conservées et montrées au centre, en Europe et Amérique du Nord, révèlent avec acuité l'asymétrie des relations entre ces institutions et les régions de provenance de leurs collections. Le souci de présenter les cultures de manière objective et encyclopédique en présentant leur culture matérielle dans des vitrines a manifestement failli au regard de la compréhension du monde d'aujourd'hui.
Cependant en Europe un nouveau questionnement a surgi lors des préparations de l'ouverture du musée du quai Branly à Paris, du nouveau musée royal d'Afrique centrale à Tervuren et de l'Humboldt Forum à Berlin, impliquant des experts africains de musées. L'exigeance d'impliquer les professionnels et chercheurs africains est incontesté dans ce contexte afin d'embarquer les musées en Afrique dans le champ de l'exploration. Bien qu'il ait eu de nombreux programmes de coopération entre musées africains et européens, seuls quelques-uns peuvent se montrer à la hauteur des critiques postcoloniales. Soit ces programmes de coopération sont quasiment unidirectionnels, en présentant des expositions préconçues en Europe pour les musées africains ou visant à renforcer les capacités de ceux–ci dans des domaines comme la conservation, la restauration ou le montage d'exposition, ce faisant dans une perspective de développement. D'autres sont mis en œuvre uniquement sous forme de consultation dans le cadre d'échanges d'expérience avec des muséologues «afripolitains» en Europe. Seulement peu de collaborations se préoccupent de la mise en œuvre d'un projet conjoint basé sur des attentes locales et des objectifs et besoins de toutes les parties prenantes.
Le présent atelier s'intéressera aux questions suivantes: Quels sont les conditions et impacts de la coopération entre les musées en Afrique et en Europe aujourd'hui? Comment la coopération Nord-Sud influence-t-elle le futur du musée ethnographique en Afrique et en Europe ? Comment nous collectons, interprétons et communiquons la culture matérielle au 21ème siècle ? Existe-t-il des récits partagés sur les musées et comment sont-ils produits? Comment l'urbain se traduit-il dans le travail muséal, dans les expositions et l'interaction avec le public?
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