Le rôle important des intimités transnationales entre hommes européens et femmes africaines dans le cadre de stratégies plus larges de migration féminine et de mobilité sociale est aujourd'hui bien documenté. Cependant les liens complexes entre ces stratégies et les dynamiques de parenté sur la longue durée sont moins connus. En quoi le mariage transnational et la migration contribuent-ils à transformer les pratiques de parenté ?
Dans cette présentation, je réponds à cette question à partir du cas des mariages transnationaux entre des femmes malgaches de la côte et des Français provinciaux. À Madagascar, le mariage est idéalement virilocal, mais les femmes cherchent néanmoins souvent à intégrer leur mari dans leurs réseaux de parenté propre, afin de consolider leur statut et de faire la preuve de leur moralité auprès de leurs proches. Aujourd'hui, lorsque les femmes malgaches épousent des hommes européens, le couple migre en général en France. Cependant, les femmes cherchent toujours à intégrer leurs maris à leurs réseaux de parenté locaux, souvent à l'occasion de séjours de vacances à Madagascar. Ces voyages s'avèrent pourtant risqués parce qu'ils font apparaître les contradictions considérables entre, d'un côté, les attentes locales liées au fait d'avoir un conjoint Européen, et de l'autre la réalité de la situation des femmes migrantes africaines en Europe. Ces voyages sont également risqués parce que les hommes ne sont pas toujours à même de comprendre ce que les familles font, ni comment ils sont censés agir. Si ces hommes sont à certains égards des gendres idéaux, ils sont aussi dangereux car ils ne respectent pas toujours les codes locaux de comportement. En élaborant l'idée de connexion et de déconnexion orchestrée, j'analyse la façon dont les femmes gèrent ces voyages et leurs potentielles conséquences sociales.