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Panata Sara

Le congrès « La femme africaine trace son avenir » de 1960 : un pas ouest-africain vers un « panafricanisme au féminin »
Sara Panata  1, 2, 3@  
1 : Institut de Sciences Humaines et Sociales - CNRS  (InSHS-CNRS)  -  Site web
Centre National de la Recherche Scientifique - CNRS
2 : Institut Français de Recherche en Afrique  (IFRA)  -  Site web
Institute of African Studies University of Ibadan Ibadan, Oyo State Nigeria -  Nigéria
3 : Institut des mondes africains  (IMAF)
Institut de Recherche pour le Développement - IRD (FRANCE), Aix Marseille Université, École Pratique des Hautes Études [EPHE], Université Paris I - Panthéon-Sorbonne, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS), CNRS : UMR8171
Institut des mondes africains - 9, rue Malher 75004 Paris -  France

En 1960, la ville d'Ibadan, au sud-ouest du Nigéria, se prépare à héberger le plus grand événement international organisé par les femmes nigérianes avant l'indépendance : un congrès international rassemblant les femmes de l'ensemble de l'Afrique occidentale dans le but de discuter de l'avenir de l'Africaine et de sa position sociale dans cette sous-région. Le congrès, baptisé « La femme africaine trace son avenir », se déroule du 1er au 12 août 1960, et enregistre la participation de soixante-et-une femmes, venues de la Guinée, du Sénégal, de la Sierra Leone, du Ghana, de la République du Togo, du Dahomey, du Sud Cameroun, de la Fédération du Mali et du Nigéria. Organisée par le National Council of Women du Nigéria, appuyée par l'Alliance Internationale des Femmes et financée par l'UNESCO, cette conférence envisage de créer une plateforme d'échanges pour les femmes de l'Afrique occidentale. Les Africaines, tout en se laissant coordonner par leurs collègues européennes, ressentent le besoin de revendiquer leur autonomie, de discuter, au sein d'une même communauté, des problèmes causés par l'interaction entre un « système traditionnel » et la « civilisation moderne ». De plus, elles déclarent partager une culture, une tradition, une histoire et des dynamiques politiques similaires, qui justifient à leurs yeux de se réunir de manière autonome. Mais quelles sont les particularités ouest-africaines des thèmes de discussion et des résolutions adoptées ? En s'appuyant sur le rapport du congrès, rédigé en anglais et en français, il sera opportun de s'interroger à la fois sur la « spécificité africaine » des discours qui circulent dans ces réseaux et sur les ruptures qu'ils portent, avec les contextes et particularités nationaux.

Par ailleurs, l'année où les Nigérianes expriment la nécessité de cette conférence au Congrès de l'Alliance Internationale des Femmes à Athènes du 1954, des déléguées africaines de l'AOF proposent la création de l'Union des femmes africaines, lors de la conférence de la Fédération Démocratique Internationale des Femmes (FDIF) à Vienne. Alors que l'AIF est née aux États-Unis au début du vingtième siècle, comme une organisation non-gouvernementale conçue dans le but de lutter pour les droits des femmes, la FDIF est née à Paris en 1945, sous l'impulsion de femmes antifascistes de plusieurs pays qui veulent lutter pour l'écrasement du fascisme. Dans leur majorité communistes, ces femmes mènent parallèlement un travail de propagande pour l'Union Soviétique dans un contexte d'opposition des deux blocs. Ces deux organisations militent donc toutes pour les droits des femmes, mais sont attachées à deux sphères d'influence opposées. Comment l'alignement politique de ces deux organismes internationaux, influence-t-il l'orientation idéologique de ces groupements féminins africains ? L'idée d'une identité féminine africaine peut-elle surmonter ces enjeux internationaux de Guerre Froide ? Il sera donc opportun de s'interroger sur les divergences et les points des contacts entre ces deux réseaux féminins africains pour saisir comment cet engagement des Africaines s'insère dans un contexte de plus grande envergure.


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