Les échéances électorales africaines et l'ancrage du multipartisme ont permis d'interroger les conditions du maintien autoritaire en dépit d'élections régulières. Les élections ont ainsi pu être perçues comme des écrans de fumée, voire des instruments manipulés habilement par des gouvernements autoritaires pour se renforcer (comme l'ont encore récemment défendu Levitski & May dans un dossier du Journal of Democracy paru en janvier 2015 ; voir aussi les travaux de Magaloni sur le Mexique). S. Lindberg a pour sa part montré que les élections, sous certaines conditions, pouvaient au contraire représenter des leviers de « démocratisation », jusqu'à conduire dans le « meilleur » des cas à ce qu'il nomme une « full democracy » (Lindberg 2006). Enfin une approche (qui doit être articulée aux deux premières) met l'accent sur le caractère « hybride » des régimes pour souligner la coexistence de dispositifs autoritaires et démocratiques (Diamond 2002 ; Perrot et al. 2015). Cette dernière approche relève le caractère flou de la frontière entre démocratie et autoritarisme, où le régime n'est plus tout à fait autoritaire, ni tout à fait démocratique.
Néanmoins, l'idée d'hybridité n'est pas sans poser au moins deux questions quant à l'idée de démocratisation. Primo, on risque tout d'abord de masquer, derrière l'hybridité, le caractère foncièrement autoritaire des régimes et valider ainsi en partie leur maquillage démocratique. Secundo, on y lit la persistance d'un « modèle » démocratique qui faudrait atteindre. En effet, cette « full democracy » n'est autre que le régime représentatif, hérité du libéralisme dans lequel la légitimité des représentants serait fondée sur l'élection de ses élites.
Or, les limites de ce modèle, voire sa « crise », sont précisément discutés « en occident » depuis plusieurs décennies. Ce panel propose ainsi d'interroger la crise de la représentation à partir de situations dites « hybrides ». Alors que la littérature souligne le dévoiement d'un modèle (où les institutions démocratiques coexisteraient avec des pratiques autoritaires), on se demandera plutôt si l'on assiste à d'autres formes prises par la crise du modèle représentatif lui-même. On pourra notamment déterminer les ressorts de cette crise, en les comparant éventuellement avec ses racines et ses symptômes en Europe ou ailleurs. Dans quelle mesure la situation « hybride » aujourd'hui interprétée comme une sorte d'« étape » vers la mise en œuvre de la représentation, informe-t-elle en retour sur le modèle représentatif et ses limites dans les régimes occidentaux ? Comment saisir les modalités concrètes de participation des citoyens sur le continent ? Faut-il pour cela s'extraire des modèles démocratiques ?
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