Réagissant au développement de multiples scènes autour du rap et de genres musicaux hybrides sur le continent africain depuis la fin des années 1980, cet atelier propose de s'intéresser à ces phénomènes musicaux devenus centraux, à la fois dans les paysages culturels urbains, et dans les discours sur les jeunesses africaines, afin de soulever par ce biais une réflexion sur le politique et le cosmopolitique chez les jeunesses africaines contemporaines.
A rebours de présupposés qui considèrent la dimension politique du rap comme allant de soi, nous invitons d'abord à examiner comment cette musique est devenue un outil et/ou un vecteur du politique, et à s'intéresser aux formes d'extraversion et de revendications transnationales qui se nichent dans ces pratiques musicales. Afin de réfléchir au-delà d'un dualisme qui penserait les politiques du rap au travers du seul binôme dissidence / allégeance partisane, nous appelons à examiner la pluralité, la versatilité et l'ambigüité des pratiques du politique chez les jeunesses des États africains contemporains. En effet, les implantations de longue durée du rap dans les paysages politiques du continent révèlent des positionnements à l'égard du pouvoir qui se réduisent rarement au mode de la contestation : le rap est par exemple devenu dans plusieurs États un outil de propagande, instrumentalisé par la classe politique afin de drainer les foules, et les rappeurs déploient souvent des rapports ambigus avec le pouvoir.
Dans un second temps, nous appelons à réfléchir aux revendications cosmopolites et transnationales qui se développent dans le sillon de la production rap, par des économies collaboratives transfrontalières, des festivals de rap panafricains, des connexions avec des ONG, ou encore par des appropriations d'esthétiques et de mouvements d'idées globalisés. Il s'agira d'interroger les enjeux politiques de ces connexions, les mises en mouvement et les processus d'hybridation qu'elles engendrent, mais aussi de réfléchir à leurs mises en tension avec des affirmations d'ancrage locaux. Il sera alors possible de penser la multiscalarité, la flexibilité et les stratégies mobilisées par les acteurs des mondes du rap.
Nous invitons nos contributeurs à élaborer leurs réflexions à partir d'études de cas situées, et depuis des perspectives disciplinaires variées (anthropologie, histoire, sciences politiques, ethnomusicologie, sociologie). Au-delà du rap, les articles pourront offrir des comparaisons avec d'autres genres musicaux urbains nés de la rencontre avec les musiques hip-hop à partir des années 1980, tels que le zouglou, le kwaïto, le kuduro ou le bongo flava.
Enfin, cet atelier sera l'occasion de présenter le dossier « Polyphonies rap » de la revue Politique Africaine, qui paraîtra en avril 2016, même s'il ne se bornera pas aux contributeurs de ce numéro. Nous accueillerons aussi favorablement les propositions de contributions extérieures à ce projet, dans la mesure où elles répondront aux problématiques de l'atelier.
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