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Masquelier Bertrand

Hétéroglossies (au sein) des sphères publiques d'exilés (afro-) caribéennes (atelier Alice Degorce & Sandra Bornand)
Bertrand Masquelier  1@  
1 : Lacito CNRS Paris 3
Lacito

 

Pour l'atelier (Alice Degorce et Sandra Bornand) Les Afriques au prisme de l'anthropologie de la parole : terrains et objets en contexte globalisé

 

L'objectif de cette présentation est de montrer en quoi les récentes préoccupations analytiques des anthropologues linguistes (Lucy, 1993 ; Silverstein et Urban, 1996) conviennent à l'étude des pratiques langagières qui participent des contextes de la globalisation. Dans le cadre de cette communication, nous ferons référence à l'ethnographie linguistique des façons de parler qui habitent les mondes afro-caribéens. Les problématiques « théoriques » abordées concernent l'étude des « idéologiques » langagières et la métapragmatique des usages langagiers – en référence aux paroles chantées du calypso trinidadien.

Dans les années 1960-1970-1980, l'ethnographie des pratiques langagières des Caraïbes a joué un rôle déterminant dans l'émergence de l'anthropologie linguistique anglophone (Abrahams, 1983). Cette approche a privilégié l'étude de pratiques langagières « locales », organisées sous divers genres de discours (parlés, chantés, etc.), au sein d'une grande variété de situations (urbaines, villageoises) ou de champs sociaux spécifiques (carnavalesques, politiques, etc.). Sous ce paradigme, certaines des recherches ont pris en compte les problématiques linguistiques des langues créoles et l'incroyable complexité sociolinguistique de la région – par exemple, le multilinguisme de Trinidad et Tobago, la situation diglossique à Haïti, le bilinguisme de St Lucie. Cette tradition de recherche de l'anthropologie linguistique est toujours vivace ; ses démarches ethnographiques et théoriques sont largement partagées.

Toutefois, l'expérience de l'anthropologie linguistique « caribéenne » s'est renouvelée au XXIème siècle sous l'effet de trois débats principalement « anglophones » : autour des Cultural Studies et de la critique (par des universitaires d'origine caribéenne, qui enseignent aux Etats-Unis ou à l'université des West Indies) des programmes de l'anthropologie sociale centrée sur les Caraïbes (Michel-Rolph Trouillot, 1992). Un dernier renouvellement est lié à la « réinvention » du terrain ethnographique (George Marcus, 1998) et à l'émergence d' « objets » d'étude tels que celui des « sphères publiques d'exilés » – cette dernière expression traduit (grosso modo) celle d'ethnoscape, proposée par Arjun Appadurai (1991) ; elle cherche à prendre en compte ces espaces sociaux et culturels constitués dans un contexte postcolonial et de globalisation.

Les pratiques sociales et langagières (afro-) caribéennes sont désormais contextualisées en référence à la longue durée (de l'histoire de la traite et des situations coloniales), à l'espace atlantique de la diaspora africaine et aux mouvements migratoires qui ont recomposé, tout au long du dernier siècle (XXème), les communautés locales et les quartiers des grandes villes d'Amérique du nord et de Grande Bretagne, qui demeurent les destinations des migrations contemporaines.

 


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